jueves, 3 de septiembre de 2015

La rentrée, vue par l'écrivain Éric-Emmanuel Schmitt



SEPTEMBRE OU L'OPTIMISME

Je n’ai jamais été l’un de ces enfants qui pleuraient sur le perron de l’école le jour de la rentrée, agrippés aux jambes de leur mère, suspectant je ne sais quel abandon. Tout au contraire, j’éprouvais une telle ivresse à l’idée de découvrir de nouveaux maîtres, de nouveaux camarades, de nouveaux cours - en un mot « un nouvel âge » - que, bien avant que nous arrivions à l’établissement, je sautais de la voiture familiale en criant « à ce soir » sans me retourner. Parfois, devant ces enfants sanglotants qui occupaient tous les adultes disponibles et qui devenaient l’objet de tous les soins, je me demandais d’ailleurs si je n’avais pas tort : peut-être étais-je dépourvu de cœur ? Ou d’à propos… 

A la fin de mes études, j’ai craint un instant de ne plus connaître de « rentrées », mais devenant professeur, puis dramaturge, enfin romancier, j’abordais chaque fois d’autres rentrées, universitaires, théâtrales, littéraires. 

Qu’est-ce qu’une rentrée ? La rentrée n’est pas la fin des vacances ni la reprise du travail, c’est surtout… une promesse… un rendez-vous amoureux… un désir qui va obtenir satisfaction… un projet qui donne envie d’exister… un mariage avec l’inconnu.
Sans rentrée, la vie ressemble à la mort. Qui - sincèrement - se souhaite le repos éternel ? Les vacances, il faut en cultiver la nostalgie, guère davantage. 
J’aime cette idée que, annuellement, une vie différente nous attend. A quarante ans passés, je veux croire toujours que les deux mois de l’été, comme l’incubation d’une larve, nous permettent de devenir autres, nous offrant une hallucinante poussée de croissance qui nous rend « plus grands » en septembre. 
Il n’y a que les historiens et les comptables qui comptent les années à partir de janvier… Nous, dans notre cœur, à sa subite accélération, aux perspectives neuves qui s’annoncent, nous ne ressentons un changement qu’à l’automne. 
Certes, les rentrées ne sont pas dépourvues d’illusions, telles ces horribles et intenables bonnes résolutions que nous prenons allongés sur les plages, chimères de régime, de sport, de leçons de danse ou de cours du soir. En quelques jours, ces vœux pieux – ou plutôt ces vœux formulés dans un pieux - s’évanouiront pour laisser place à l’essentiel, les rencontres, les nouveautés, les projets repris avec une énergie reconstituée. 
Je me suis dessiné un calendrier singulier, un calendrier où chaque mois reçoit le nom d’une vertu philosophique car les qualités de l’âme aussi ont leur période, leur histoire, leur météorologie, leur almanach : septembre s’y appelle l’optimisme…


Découvrez le site de l'auteur: 


Quelques-unes de ses oeuvres à découvrir: 

- La techtonique des sentiments (théâtre)

Cette pièce montre la psychologie de personnages tourmentés par les séismes de la passion amoureuse, du fait d'une véritable "tectonique des sentiments" : l'amour prédit la haine, l'élégance se transforme en cruauté et tendresse devient désespoir.

- Le sumo qui ne pouvait pas grossir (roman court)

Dans une ville du Japon, de nos jours, un garçon de 10 ans grandit dans un orphelinat. Son père est mort de surmenage professionnel et sa mère est atteinte de cyclothymie aiguë. Comme tous les enfants de son âge, il est passionné de technologies et de jeux vidéo. Etrangement, il a attiré l’attention d’un lutteur de sumo, de passage. Ce dernier, grand maître de force et de sagesse, a repéré le “gros” qui se cache en lui. Il entreprend donc, alors que ce gosse garde sa corpulence normale, de lui expliquer les éléments fondamentaux et les pratiques d’un sport ancestral et d’un art martial qui touche à la plus profonde philosophie zen…

- Oscar et la dame rose (roman et adaptation au cinéma)

Oscar, 10 ans, séjourne dans un hôpital pour enfants. Personne n'ose lui parler de sa maladie, une leucémie. Un jour, il fait la connaissance de Rose, une femme à l'air bougon, mais qui fait preuve de franchise envers lui. Elle lui propose un jeu comportant une seule règle : vivre chaque jour comme s'il en valait dix, et se confier à Dieu en lui écrivant des lettres. Désormais, un lien indestructible va souder l'enfant et la dame rose. Grâce à son aide, Oscar apprivoise les angoisses liées à sa situation et, autant qu'il le peut, profite de la vie. Son moral s'améliore, mais le mal qui le ronge, lui, ne semble pas vouloir le laisser en paix...

- Odette Toutlemonde (petites nouvelles et adaptation au cinéma)

Huit récits, huit femmes, huit histoires d'amour. De la petite vendeuse à la milliardaire implacable, de la trentenaire désabusée à une mystérieuse princesse aux pieds nus en passant par des maris ambigus, des amants lâches et des mères en mal de filles, c'est une galerie de personnages en pleine quête du bonheur.